Laiterie Coopérative de Nieul-Sur-l'Autise (85)
LAITERIE COOPÉRATIVE DE NIEUL-SUR-L’AUTISE [85] par Marcel Gousseau.
SITUATION GÉOGRAPHIQUE : Petite cité de caractère située aux portes du Marais poitevin, Nieul-Sur-l’Autise, est une petite commune du sud de la Vendée, qui comptait presque 1300 habitants au dernier recensement de 2011. Le bourg se distingue par ses nombreux points d’intérêt comme le remarquable cloître de l’abbaye royale, le camp néolithique du Champ Durand, ou encore la Maison de la Meunerie et son moulin à eau construit en 1728, et toujours en activité. Nieul-sur-Autise, c’était aussi il y’a plus d’un siècle déjà, une activité laitière à travers une coopérative qui donnait du travail à ses habitants et permettait de valoriser le lait livré par ses sociétaires.
NAISSANCE D’UNE LAITERIE : C’est en 1894, que le vicomte Raymond de Bresson, du château de Denant (1), tente de convaincre des producteurs laitiers des avantages de la coopération. Des documents démontrent même que dès 1892-1893, le vicomte aurait fondé une association, et que lorsque l’entreprise fut lancée et s’avéra rentable, il la mit en coopérative gratuitement au profit des agriculteurs de Nieul & ses environs. Selon les cahiers de l’Association Centrale de Surgères, la Coopérative est officiellement fondée le 15 mars 1896. Ses statuts comprennent alors 12 articles étalés sur cinq pages. Elle devenait la dixième laiterie coopérative de la Vendée et la 66ème de la région Poitou-Charentes. Elle est administrée à ses débuts par un bureau composé du Président, en l’occurrence, le vicomte de Bresson, et de dix vice-présidents représentant des sections, dans les communes où le lait était collecté.
L’ACTIVITÉ À LA LAITERIE : En 1924, Monsieur Léon Garnier, propriétaire agriculteur à Oulmes, est élu nouveau président de la coopérative. À partir de 1926, Monsieur Edmond Baudouin, diplômé de l’école de Surgères devient directeur, poste qu’il occupera jusqu’en 1962. Ces deux hommes vont réussir à hisser la laiterie coopérative parmi les meilleures de la région. La laiterie de Nieul-Sur-l’Autise collectait alors le lait de la région depuis Oulmes, où se trouvait une première association d’agriculteurs, jusqu’à Longèves, Fontaines, Foussais, Saint-Hilaire des Loges, Saint-Michel le Cloucq. 17 laitiers amenaient le lait à l’usine, leur charrette tirée par un cheval toujours remplie de bidons de lait. Quant aux laitiers de Saint-Médard des Prés, Pissotte, et Longèves, ne pouvant faire le déplacement dans la journée, ils apportaient leurs bidons de 100 litres sur le quai de Fontenay-le-Comte, où un camion venait les récupérer et les livrer à l’usine de Nieul. Au début, La collecte s’élevait à une moyenne de 18000 litres de lait par jour. La matière première était transformée en beurre de table extra-fin, acheminé par voie ferrée en colis de 5 et 10 kilos et au dessus, à partir des gares de Benet ou de Niort vers de nombreuses destinations, les principales étant Paris et les anciennes colonies françaises où la marque était bien connue et appréciée.
UNE COOPÉRATIVE ET SA BANQUE : Au cours des années 1940-1960, la laiterie Coopérative de Nieul-sur-l’Autise travaillait avec la Société Générale et son agence de Fontenay-le-Comte. Dans le milieu agricole, à cette époque, il n’y avait que le Crédit Agricole qui comptait. Quand les fonds « Marchall » sont arrivés pour aider la France à se relever de la guerre, la laiterie de St-Michel en l’Herm était la plus importante, suivie de Nieul-sur-l’Autise. Cette dernière, était donc sur la liste des bénéficiaires des fonds, établie par les services agricoles. Mais, ne travaillant pas avec le Crédit Agricole, elle est en quelque sorte sanctionnée, et l’aide sera attribuée à la Coopérative Laitière du Mazeau, qui sera reconstruite à neuf, avec une tour de séchage, la première de Vendée. L’UCAL de Luçon va aussi bénéficier des fonds Marchall. Cet argent frais relancera l’activité laitière dans la région. Enfin, en 1960, la direction de Nieul-sur-l’Autise, décide de changer de banque et de travailler avec le Crédit Agricole.
ÉVOLUTION ET REGROUPEMENTS : Le 05 août 1969, le conseil d’administration se prononce en faveur de l’adhésion de la coopérative à l’Union Sud Vendéenne Agricole Laitière (USVAL), basée à St-Michel-en-l’Herm, qui regroupe les coopératives de Mareuil, Nallier, Le Langon, et Sainte-Radegonde des Noyers, sans que les activités de Nieul-sur-l’Autise ne soient remises en cause. Deux ans plus tôt, l’usine de Nieul avec l’ULMCP s’était spécialisée dans la fabrication des fromages de chèvre. Après son adhésion à l’USVAL, elle commencera la fabrication de fromages à pâte pressée, ainsi que du lait de consommation et de la crème. Ces produits seront commercialisés par un service de distribution dans la région de Niort et Fontenay-le-Comte, chez les commerçants et les collectivités locales. En 1978, ce service de distribution du lait est transféré à Mareuil-sur-Lay, qui commercialisait la marque de lait fort connue « le Petit Vendéen ». Finalement, tous ces regroupements furent un échec, les orientations nécessaires n’étant pas prises par les responsables de l’époque.
FABRICATIONS : La laiterie de Nieul était spécialisée dans le lait de consommation courante (brique de Nieul) et surtout dans la fabrication du beurre, et ce depuis sa création en 1896. Elle fabriquait aussi de la caséine; Durant la courte période de sa collaboration avec l’ULMCP, elle fabriquera des fromages de chèvre comme le Picton, Le Picton frais, le Picaillon, le Collibert, un fromage pur chèvre à 48 pour cent de matière grasse, mais aussi des fromages comme la Mizotte, la raclette, et le « Auzay » un fromage à 45 pour cent de matière grasse. Ses beurres Extra-Fins, seront récompensés de façon régulière au Concours Général Agricole. En voici quelques exemples : Médailles d'Or en 1926,1934, 1935,1936, 1937, Médailles d'Argent en 1927, 1929, 1933, enfin, une Médaille de Bronze en 1964, pour son beurre pasteurisé.
QUELQUES CHIFFRES : En 1960, la laiterie ramassait 7.635.948 litres de lait par an. En 1966 : 9.390.180 litres. Le nombre de sociétaires était de 340 en 1960, il passait à 395 en 1966. Prix payé du litre 39,11 anciens francs en 1960, et 0,688 francs en 1966. Le chiffre d’affaires (CA) était de 1.069.902 anciens francs en 1960 et de 7.382.626 francs en 1966. La laiterie employait enfin 13 personnes en 1960 et 25 salariés en 1966, comprenant un directeur, deux comptables et un suppléant, trois secrétaires et deux suppléantes, un Contremaître et un suppléant, deux fromagers et un suppléant, un beurrier et deux aide-beurriers, un caséinier, un écrémeur, une personne responsable de l’emballage, quatre livreurs et une personne pour l’entretien.
LA FIN D’UNE ÉPOQUE : Suite à une décision de l’USVAL en 1985, la laiterie de Nieul-sur l’Autise va cesser toute activité et fermer ses portes. Monsieur Roy Jean sera son dernier directeur. Les raisons de la fermeture étaient liées à des questions d’investissements qui devenaient indispensables pour la survie du groupe. La direction lance alors un plan de restructurations, et certains employés seront reclassés à Mareuil ou à Saint-Michel-en-l’Herm. Un incendie finira de détruire l’usine. Bureaux et maison d’habitation seront transformés en logements locatifs. Enfin, la haute cheminée, qui faisait partie du paysage local,sera démolie en 1992.
(1) En 1901, il est membre de l’Union du Cercle Artistique on le retrouve à l’adresse suivante : 4, rue d’Argenson à Paris. En 1905, le vicomte Raymond de Bresson habitait 31bis boulevard Lannes à Paris. En 1908, membre du Jockey Club, il a comme adresse, 3, rue Dinot à Marans, Charente-Inférieure, En 1910, il a une adresse au 15, rue Cardinet, à Paris.
GOUSSEAU MARCEL [Camembert-Museum, le 16 novembre 2014]
Date de dernière mise à jour : 09/07/2021