La Lézarde (Montivilliers, Seine-Maritime 76)
LAITERIE DE LA LÉZARDE [MONTIVILLIERS 76]
L’histoire de cette laiterie commence avec la création de la GOUTTE DE LAIT en 1901, par un petit groupe de notables du pays comme M. Guérin (agent de change), Monsieur Lefebvre, ou le baron Petiot (Automobile Club de France), et ce, dans un local situé place de Raimbourg à Montivilliers.
En 1903, dans son édition du 5 juillet, le Travailleur Normand nous rapporte l’information suivante : Au Palais. Un jugement intéressant pour l'agriculture. Ministère public v/s Laiterie Moderne de la Vallée de la Lézarde.» Dans son audience du 22 juin 1903, le tribunal correctionnel du Havre a rendu un jugement fort Intéressant pour l'industrie du lait et par conséquent pour toute l'agriculture de notre région. Il s'agit de la question de l’écrémage.
Nos lecteurs savent que la « Laiterie Moderne de la Vallée de la Lézarde, fondée il y’a deux ans à Montivilliers, achète le lait d'un très grand nombre de cultivateurs de la région ; ce lait, apporté à la laiterie, y est immédiatement pasteurisé, afin de mieux se conserver, et livré à la consommation en bouteilles portant le nom de la laiterie.
Or, en février dernier, le laboratoire municipal du Havre analysait un échantillon de lait prélevé sur une bouteille de la laiterie, et de ce que l'analyse révélait une teneur en beurre de 35 grammes, le laboratoire concluait à un écrémage de 13 pour cent. Après une instruction qui a fait ressortir toute la correction des procédés de la laiterie qui reçoit le lait directement des cultivateurs et après l'avoir pasteurisé d'après les méthodes les plus récentes, le livre dans son état naturel au public, l'affaire venait devant le tribunal.
Celui-ci sa trouvait entre l'affirmation un peu stricte du laboratoire municipale, qu'il existe une limite en matières grasses au-dessous de laquelle le lait doit nécessairement être présumé écrémé, et que cette limite pour les vaches de la région doit être fixée à 40 grammes, et la défense de la laiterie qui, avec de nombreux documents établissait que :
1° que d'après les autorités les plus compétentes (notamment MM. Houzeau, directeur de la station agronomique, et Laurent, titulaire de la chaire départemental d'agriculture de la Seine-Inférieure)
il existe un grand nombre do circonstances qui peuvent influer sur la richesse beurrière du lait et spécialement le genre d'alimentation des vaches, le vêlage, la saison ainsi que la race même des vaches; 2° que le chiffre constaté dans le lait analysé, de 35 grammes de beurre, n'avait rien d'anormal pour la saison et pour la généralité des vaches de la région; 3° que le lait apporté par les cultivateurs était analysé à la laiterie et que les analyses faisaient ressortir dans plus d'un cas des teneurs beurrières sensiblement inférieures à ce chiffre; 4° qu'enfin lorsque ces analyses faisaient ressortir une richesse beurrière trop faible, des observations par lettre étaient faites aux cultivateurs et qu'en cas de récidive la laiterie cessait de prendre le lait incriminé.
C'est la thèse de la défense qu'a adopté le tribunal et par son Jugement il a donné gain de cause à la laiterie en acquittant ses directeurs de la prévention d'écrémage qui n'était nullement établie.
En 1909, la Goutte de Lait déménage et s’installe dans les locaux d’un notaire, dont Monsieur Lefebvre, cité précédemment était le propriétaire du local, Cette même année, création le 16 décembre 1909, de la Société Anonyme dite : Société de la laiterie Moderne de la Vallée de la Lézarde, située 14, place du Champ-de-Foire. Le capital social est de 255,000 francs, et la durée est de 25 ans.
En 1914, Adolphe Guillemot-Tréffainguy, né en 1875 à Sèvres (Hauts-de-Seine) devient directeur et propriétaire de la laiterie de la Lézarde. Avec son épouse, de son nom de jeune fille Athénas Jeanne Marie Henriette et leur fils Charles né en 1904 à Versailles, la famille s’installe 20, place du Champ-de-Foire à Montivilliers. La laiterie collecte environ 1000 litres de lait par jour, et assure elle-même la livraison de sa production dans la ville du Havre à l’aide de voitures tirées par des chevaux. Dans une étude sur l’allaitement artificiel dans la classe pauvre, « la Goutte de Lait du Havre » par le Dr G. Leffilatre, thèse de 32 pages du 23 janvier 1901 il est dit que le Dr Caron ayant pris l’initiative de la Goutte de Lait du Havre, le lait est apporté deux fois par jour d’une ferme de Montivilliers. On le maternise, on le stérilise avant de le distribuer aux mères.
En 1921, la Laiterie de la Lézarde collecte entre 10,000 et 12,000 litres de lait pendant la belle saison et de 4000 à 5000 litres seulement en hiver. Le lait fourni est ramassé chez 180 à 200 fermiers de la région. Une petite et discrète production de fromage genre camembert existe sous la marque « La Lézarde » (Voir cette rare étiquette de notre collection). En 1924, il est toujours fait mention dans l’Annuaire Général de l’Industrie Laitière de M. Tréffainguy. A. laiterie de la Lézarde, à Montivilliers (76). En 1934, le Président de la République, sur le rapport du garde des sceaux, ministre de la Justice, nomme M. Guillemot-Tréffainguy Charles, fils de M. Adolphe Guillemot-Tréffainguy, suppléant au juge de paix de Duclair (Seine-Inférieure) en remplacement de M. Laporte décédé. Le 13 juin 1960, Adolphe Guillemot-Tréffainguy décède. Il était âgé de 84 ans. Il sera inhumé au cimetière de Montparnasse à Paris.
La laiterie de la Lézarde cessera son activité le 1er juin 1965. Cependant l'activité reprendra sous la forme d'une coopérative : La Coopérative Laitière Havraise.
Serge Schéhadé (Camembert-Museum, le 09 octobre 2019).
Date de dernière mise à jour : 26/11/2022