Rendu Maurice (Fromageries Lieury & Rocques)

St-Jean-de-Livet

Carte postale de la fromagerie de Saint-Jean-de-Livet, dans les environs de Saint-Martin-de-la-Lieue (Calvados). On peut logiquement supposer que la famille Rendu a exploité aussi la fromagerie de Saint-Jean-de-Livet au vu de l'étiquette de l'Aviateur présentée ci-dessous.

FROMAGERIE RENDU MAURICE, à LIEURY, puis à ROCQUES par Michel Lebec.

Le 15 mai 1883 à Paris 6ème (75), Maurice Marie Jules Ambroise Rendu, né le 30 janvier 1856 à Paris 1er, fils d’Eugène Marie Victor et d’Amélie Thérèse Musnier de Lalisier, prend pour épouse Valentine Multzer née le 4 septembre 1864 à Nantes (Loire Inférieure) fille d’Emile Armand et d’Emilie Adélaïde Berthe Auger. Assiste à ce mariage, entre autre, Julien Marie Alexandre Bessard du Parc, oncle de la mariée et demeurant à Nantes.

Rendu famille (Michel Lebec)

Autre que la signature des mariés, on peut voir celles de : Eugène Rendu, Amélie Musnier de Lalisier, Emile Multzer, Julien Bessard du Parc.

Quelles raisons ou circonstances ont amenés ce jeune couple, issu de la bourgeoisie, à devenir fromager ?

Il faut dire qu’à cette époque il était de bon ton de posséder une fromagerie. C'est autour des années 1883/1885, sur la ferme du château du Robillard à Lieury (14), superbe édifice du XVII siècle, appartenant à Camille-Rose d'Infréville, que Maurice Rendu, s'installe comme cultivateur, avec sa jeune épouse Valentine. Suzanne Henriette naît le 15 juin 1884, Germaine Marthe le 10 mai 1886 et Renée Eugénie Berthe le 31mai 1889, toutes trois à Lieury.

Bât Rendu (Michel)

Maurice commence la fabrication de camembert. En 1891, il n'a pas moins d'une douzaine d'employés dont cinq déclarés comme fromagers. Jean Lavalou, futur industriel laitier au Bourg-Saint-Léonard (61), afin de parfaire ses études sur l’industrie laitière, y rencontre Maurice Rendu afin d’y étudier les méthodes de fabrication. M. Julien Bessard du Parc, 63 ans, membre de la famille, est déclaré habitant chez Maurice Rendu. Il est à l’origine, avec son fils, de la fromagerie de Bernières-d’Ailly (14) puis à Fierville(14) et de la Chapelle-aux-Pots (60). Sa fille, Yvonne, en épousant Henri Lhermat celle du Château de Navarre à Chicheboville près d Argences (14). Emile Multzer, père de Valentine, lui aussi chez Maurice,  créera la fromagerie du Fief-Nouvel dont nous aurons l’occasion de revenir pour ces deux fromageries.

Maurice Rendu quitte fin 1894, le Robillard pour aller s'installer à Rocques, près de Lisieux (14). Cette fromagerie est reprise par Albert Rabarot et son épouse. Maurice Rendu fait construire, en 1895, une fromagerie sur le site du château de Rocques appartenant à la famille du Merle. Celle-ci est partiellement incendiée en 1896, puis à nouveau en 1901. Elle est reconstruite vers 1905. Les camemberts sont vendus sous les marques, entre autre de  '' La Mascotte'' et '' Château de Rocques''. Ces deux marques sont déposées le 11 décembre 1899 par Maurice Rendu. Maurice travaille avec un dépositaire à Londres qui s’appelait Auguste Noël. Il fait partie, le 20 mars 1909 à la mairie de Lisieux, des membres fondateurs du Syndicat des Fabricants du Véritable Camembert Normand (S.F.V.C.N).

À partir du 21 septembre 1905, la fromagerie est exploitée par la S.N.C. Rendu et gendre. Albert Leroy, ingénieur chimiste. Il épouse Germaine le 27 septembre 1905. Quant à Suzanne,elle a pris pour époux Albert Gaudin, comptable, le 1ier mars de cette même année. Le couple habite 75 Avenue de Villiers et auront six enfants nés à Paris ce qui vaudra à Albert, rappelé en août 1914, d’être libéré le 4 juin 1918 et leur septième enfant, Jacques Albert Marie, naît Le 7 mai 1918 à Rocques. Il se mariera le 18 avril 1944, à Paris avec Jacqueline Renson. Lui et ses parents habitent rue Alphonse de Neuville, à Paris. Renée se marie le 10 décembre 1913, à Paris 17ème, et habite au 75 Avenue de Villiers, avec Eugène Marie Charles Le Chevallier. Le couple divorcera en 1922. La S.N.C. exploite également la fromagerie de La Houblonnière (14). Alfred Patry, qui était déjà employé à Lieury, en est le régisseur avec trois employés. La marque de l’étiquette ‘’Camembert du Château de la Houblonnière’’ ainsi que celle de ‘’L’Aviateur’’ sont déposées le 27 septembre 1912 par Maurice Rendu qui décède le 8 août 1914, à l'âge de 58 ans, au château de Rocques. Son épouse reprend la fromagerie et dépose, le 13 avril 1915, la marque de l'étiquette '' La Victoire ''. La France étant en guerre contre l’Allemagne ! Il faut dire que Madame Rendu, née Multzer, est d’origine, de par son nom, de la région de Nancy-Lunéville et d’autant plus que son père a été fait prisonnier par les allemands en 1870. Elle dépose, également, le 3 janvier 1925 la marque ‘’ Le Vieux Normand’’.

Rendu Maurice (Rocques-14nv) Rendu-0141nv (Houblonniere-1) Rendu Maurice (Aviateur 13nv) Rendu Maurice (l'aviateur-10nv)

Rendu Maurice (Mascotte 01nv) Rendu 0147nv (Houblonniere-5) Rendu-151nv (Rocques-14) Rendu Maurice (Victoire 01nv)

La Guerre de l’Or Blanc (Etant convoité, le lait était appelé ainsi au début siècle dernier)

Bien que l’article 7 des statuts du S.F.V.N prévoie la non-concurrence entre membres du syndicat, les fromagers se la font, malgré tout, sur le terrain à savoir le ramassage du lait auprès des fermiers et surtout quand un concurrent, nommé Nestlé, vient s’installer en 1924 à Lisieux cela crée, si besoin était, des tensions !

En date du 28 octobre 1928, lors d’une réunion du S.F.V.N., sous la Présidence de M. Saffrey, M. Vignioboul ayant démissionné, une vive discussion oppose M. Lanquetot et Mme Renée Rendu, fille de Maurice, fromagère à Rocques. M. Lanquetot accuse Mme Rendu d’avoir été voir ses clients en leur offrant des prix excessifs variant de 2,40 F à 3,25 F. Elle m’a prix par suroffre M. Palace de Mesnil-Guillaume gros client que devait me rendre la société Nestlé. Pour me défendre j’ai dû répondre à mes clients que, quels que soient les prix offerts par Mme Rendu, je suivrai ces prix. Le malheur c’est que, ces procédés faisant tâche d’huile, on serait amené à payer des prix exorbitants ! Mme Rendu contre-attaque en déclarant qu’on m’a affirmé que Palace n’avait jamais vendu son lait à la société Lanquetot, alors on m’a menti ? M. Lanquetot nous a pris le lait de Leduc à Firfol, soit environ 230 litres, pour cela il l’a payé 3 francs. Les argumentations de part et d’autres continueront et peut-être à bouts d’arguments et se sentant, peut-être, victime d’une coalition d’hommes (seulement 2 femmes, Mme Rendu et Mme Vve Seigneuret siègent au syndicat) se lève et remet à M. Saffrey une lettre de démission signée de sa mère. (Extrait du livre de Pierre Boisard ‘’Le Camembert Mythe national’’, page 127-128). La bataille du lait était courante entre fromagers, comme nous avons pu le constater, Gérard Clouet et moi, lors du dépouillement des archives de la fromagerie Lavalou du Bourg-Saint-Léonard 61. La fromagerie cesse toute activité vers 1930. A partir de 1933, le site est occupé par la congrégation des oblates de Sainte Thérèse. Auparavant, la fromagerie de la Boissière a été exploitée par plusieurs propriétaires dont, au début, par Alexandre Poussin. Valentine Multzer décède à Paris en 1956 à l’âge de 92 ans, Suzanne le 1er avril 1958, Renée le 31 juillet 1979 à Versailles (78)

Michel Lebec [Camembert-Museum, le 31 octobre 2020]

Biographie : Archives départementales du Calvados, de la Seine et la base Eléonor. Et avec le concours de Madame Le Chevallier-Penot descendante de Renée Rendu.

  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Date de dernière mise à jour : 16/11/2020