Etiquettes Passe-Partout.
Chacun de nous possède dans sa collection des passe-partout. Redondants et difficiles à classer, ils ne nous en apportent pas moins des informations précieuses sur la vie des fromageries et représentent une part non négligeable des étiquettes dites «anciennes». Les passe-partout sont des modèles d’étiquettes anonymes utilisant des thèmes génériques, présentant des illustrations ou des graphismes sans aspérités particulières. On ne peut y déceler une origine précise, aucun élément susceptible d’être identifié avec certitude n’y figure. Si on y représente une vache, ce qui est le cas le plus fréquent avec les fermières, celle-ci n’appartiendra pas à une race bien définie et les paysages illustrés seront sans caractère spécifique. Chaque passe-partout possède des plages vierges destinées à accueillir les textes qui le personnaliseront.
Faire le choix d’un passe-partout pour un fromager ou un crémier est avant tout un choix économique. Ceux-ci n’auront pas à supporter le coût d’une création, à se préoccuper d’un contenu et du message que devra véhiculer l’image qu’implique la création d’une étiquette originale. Par ailleurs, sa disponibilité est immédiate et permet une impression pratiquement sans délai. Pour chaque réimpression le texte initial pourra être modifié sans avoir à réorganiser la mise en page.
Chaque imprimeur de quelque importance propose dans sont catalogue un éventail de passe-partout afin de satisfaire une clientèle aux goûts éclectiques. Il diversifiera ses passe-partout en changeant les couleurs, les caractères typographiques ou encore en inversant l’image. Chaque passe-partout sera décliné et proposé dans toutes sortes de tailles et de formats. Ainsi, un même modèle pourra accueillir un camembert, un Pont-l’Evêque ou un Munster, servira la production de la Sarthe, de la Normandie ou des Pyrénées par exemple. Curieusement, certains passe-partout comportent la mention «Déposé»; on peut supposer que cela ne concerne que certains éléments du texte ou la présence d’un sigle, cette mention joue avec la mention «Modèle déposé».
Les passe-partout ne sont pas propres aux étiquettes de fromage, on en trouve pour toutes sortes de produits, sirops, liqueurs, vins, confitures, etc… Aujourd’hui ils s’adaptent aux nouveaux médias, ainsi on peut trouver sur le Net des habillages et configurations de sites dédiés à certaines professions et qu’il suffit de personnaliser; les modèles d’albums photos à «remplir» sont basés sur le même principe.
On trouve deux types de passe-partout ou plus exactement deux utilisations différentes, soit ils sont utilisés tels quels sans autre modification que le repiquage d’un texte (parfois cela se faisait à l’aide d’un tampon encreur) la modification des couleurs ou encore l’inversion de l’image. Dans certains cas comme on peut le voir avec le thème de la trayeuse, un même motif pourra donner naissance à plusieurs modèles de passe-partout assez différenciés les uns des autres, l’imprimeur exploitant au mieux ses créations. À titre d’information, je possède 38 étiquettes différentes de cette image d’une fermière trayant sa vache, accompagnée d’un coq. L’autre type de passe-partout est l’utilisation d’un modèle existant, disponible chez l’imprimeur, modèle que l’on aménagera à sa convenance. L’observation nous permet de constater que certains de ces modèles ont été au fil du temps abandonnés en tant que passe-partout et réservés en exclusivité à un client en particulier. Les passe-partout sont régis avec les mêmes contraintes que les autres étiquettes et évoluent de la même manière, nouveau dessin, ajout de la mention «matières grasses», présence de la vignette des syndicats…
L’utilisation des passe-partout a cessé en même temps que cessait l’activité des imprimeurs spécialisés et la disparition progressive des petites fromageries indépendantes. Le passe-partout est passé nulle part. Il serait fastidieux et illusoire de montrer tous les modèles différents d’un même passe-partout, ceux-ci étant par définition innombrables. Je me suis contenté pour illustrer cet article de développer un passe-partout (non exhaustif) et de montrer deux exemples de chacun des autres passe-partout présentés.
Michel Coudeyre – février 2013
Date de dernière mise à jour : 09/02/2020